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La clé de l'énigme sur la porte du faux toi (n°2)

  Non, je ne peux pas le croire, se dit Caroline. Comment est-ce possible ? Il y avait bien un manoir à la place de cette jolie maison il y a à peine quelques minutes ! Je n’ai tout de même pas rêvé ! Suis-je en train de perdre la tête ? Mais qu’est-ce qu’il se passe dans ma vie en ce moment ? Qu’ai-je fait pour mériter de subir autant d’ennuis et de déconvenues en tous genres ? D’abord mon lave-linge qui tombe en panne, suivi de ma chaudière, ma télévision, puis comme si ça ne suffisait pas, la foudre qui tombe sur le toit de ma maison… J’ai eu bien de la chance de ne pas avoir subi trop de dégâts, d’ailleurs… Tu me diras, mes appareils électriques sont morts juste avant l’arrivée de la foudre, alors… ils ne craignaient plus rien. C’est étrange ça, d’ailleurs. Je me demande si je dois le prendre pour un signe. Caroline se moqua d’elle-même : tu divagues, ma pauvre, le seul signe à voir dans tout ça, c’est une poisse puissance 10. Heureusement que ma chère collègue Violaine qui m’apprécie tant n’est pas au courant de tout ça, d’ailleurs. Elle aurait largement de quoi alimenter ses sombres ragots pour au moins six mois.   Enfin… laissons là ces divagations, et revenons à nos moutons. La raison voudrait que j’y retourne… pour en avoir le cœur net… Mais… non. Non, non. Ce n’est pas normal, tout ça. Que ce soit moi qui hallucine ou non, mieux vaut que je m’éloigne d’ici au plus vite, je le sens. Je vais prendre à droite, puis filer en direction du lac, tiens. Voilà ce qu’il me faut : une petite balade bucolique autour du lac pour me remettre les idées en place. Ça ne pourra que me faire du bien.

Au moment même où elle prend cette sage décision, retentit derrière elle une voix caverneuse au timbre inquiétant qui la fait sursauter :

—      Pourquoi n’es-tu pas entrée dans la maison, douce Caroline ?

La jeune femme lance un regard effrayé dans le rétroviseur et sent aussitôt ses jambes la lâcher, tandis qu’un frisson d’angoisse lui parcourt l’échine. Louis est assis à l’arrière et répète sa question avec cette voix d’outre-tombe qu’elle ne lui connait pas :

—      Alors ? Dis-moi pourquoi tu n’es pas entrée dans la maison.

  Il est parfois de ces situations qui vous paralysent et vous rendent aphones. Vous n’y pouvez rien. Vous n’avez pas la main. Vous ne maîtrisez plus rien du tout. Et au cas présent, ceci n’est guère étonnant. L’homme qui se trouve en ce moment à l’arrière de la voiture est Louis et quelqu’un d’autre en même temps. Son visage est le même, mais avec une expression plus dure et un regard plus froid. Quant à sa voix… Caroline n’a jamais entendu un tel horrible timbre de voix. Même dans les plus effrayants thrillers qu’elle a pu visionner au cours de sa vie.

—    Pourquoi tu ne réponds pas ? Réponds ! lui ordonne-t-il.

—      Je… je…

Caroline ne trouve plus ses mots. Tout s’embrouille dans sa tête. Mille pensées désordonnées lui arrivent tel un essaim de guêpes agressives. Qu’est-ce qu’il fait là ? se demande-t-elle. Comment se fait-il que je ne l’aie pas vu en entrant dans la voiture ? Ainsi, ce n’était pas dans la maison qu’il m’attendait, mais ici. Il m’observait de loin.

—      Ce n’est pas très poli de ne pas répondre aux questions, Caroline.  Et ma patience a des limites, insista la voix terrifiante de Louis.

  À ces mots, curieusement, la jeune femme se sent coupable. Coupable de ne pas lui avoir encore répondu. C’eût été presque risible si ce n’était si effrayant. Ce type visiblement dépourvu de la moindre compassion lui parle d’un ton à vous glacer le sang, et c’est elle qui se sent coupable. Elle n’a rien fait pour mériter ça, pourtant, rien. Elle ne se souvient pas lui avoir manqué de respect. À aucun moment.

—      Je sais ce qui te trotte dans la tête en cet instant, poursuit la voix. Tu te dis : il devait m’observer de la voiture. Peut-être avec des jumelles. Eh bien, oui, bonne déduction de ta part. D’ici, j’ai pu te contempler tout à loisir en train d’avancer vers l’entrée de la maison de ta jolie démarche chaloupée.

  Après cette tirade il se tait. Caroline regarde de nouveau dans le rétroviseur, et ce qu’elle voit dans le regard de Louis lui fait encore plus froid dans le dos. Elle n’a plus aucun doute sur ses intentions cachées.

—      Je disais donc que je t’ai vue avancer, poursuit-il, mais je n’ai pas compris pourquoi tu as fait subitement demi-tour au moment d’entrer. Et maintenant tu vas me dire pourquoi, et rapido.

  Caroline sent cette fois de la colère dans la voix de son ravisseur. Elle ne demande qu’à lui répondre, mais à tous les coups il ne la croira pas. Logique, elle ne se croit pas elle-même. Elle n’a jamais connu situation plus rocambolesque de toute sa vie. Elle choisit pourtant de se jeter à l’eau. Absurde pour absurde… Elle omet toutefois de préciser qu’elle, elle a vu un manoir à la place de la maison.

—      La porte s’est refermée sous mon nez, en claquant très fort. J’ai pris peur.

  Pendant quelques secondes, silence dans l’habitacle. Puis Louis répond d’une voix agacée :

—      Comment ça, la porte s’est refermée ? Qu’est-ce que tu racontes ? J’ai tout vu d’ici. La porte est restée grande ouverte. C’est toi qui as fait demi-tour.

—      C’est vrai… je t’assure, insista Caroline. Et ce n’est pas tout. Je ne sais pas ce qui se passe dans ma tête, et tu ne vas sans doute pas me croire, mais j’ai vu un manoir étrange à la place de cette maison. Je suis peut-être en train de perdre la tête, je n’sais pas, mais c’est c’que j’ai vu, en tout cas.

  L’homme reste silencieux pendant plusieurs secondes. Durant ce laps de temps, Caroline jurerait l’avoir entendu marmonner : « ça n’a pas marché ».

Mais il reprend très vite ses esprits et lui ordonne :

—      Roule ! On va faire encore 1 kilomètre, puis tu prendras la route sur la gauche.

—      D’accord, obtempère Caroline d’une voix faible, ses mains tremblant sur le volant.

  « Mon Dieu, qu’est-ce qu’il a derrière la tête ? » pense-t-elle avec angoisse. Elle a à peine fini de se poser la question qu’elle a une nouvelle vision. Ce qu’elle voit lui fait tourner vivement la tête sur le côté en tendant le cou à s’en démettre une vertèbre. Elle n’en croit pas ses yeux  exorbités.

  Sur le bas-côté se trouve Louis, le Louis qu’elle connait, sympathique et souriant, mais qui arbore cette fois une mine inquiète, voir paniquée, et qui lui fait de grands gestes du bras pour qu’elle s’arrête. Stupéfaite,  Caroline jette un regard dans le rétroviseur : Louis est toujours là, pourtant. En tout cas, l’autre Louis, le Louis au visage agressif, qui lui ordonne, tout en la menaçant d’un couteau :

—      Ne t’arrête pas. Fonce. 

 

 .../...

 



16/09/2025
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